lundi 17 décembre 2012

Top 20: Les meilleurs albums de 2012

Voici dores et déjà mon classement, le top 20, des meilleurs albums de l'année 2012 d'après mon humble-avis-subjectif-très-personnel-et-imparfait-qui-n'engage-que-moi.
Vu que j'ai été peu présent cette année, je vais tenter de me rattraper avec un beau top sorti de derrière les fagots rien que pour vous. Ce classement a vocation à être amélioré dans les prochains jours par les critiques des albums classés 11ème à 20ème. Mais je ne résiste pas à vous partager déjà le top.

Je tiens à préciser que j'ai exclu volontairement les albums rap, pour me concentrer sur les meilleurs albums en pop, rock, folk et électro.

En espérant que ça puisse vous permettre de découvrir deux trois trucs sympas.


1. Grimes - Visions


Certainement le disque le plus ambitieux et le plus impressionnant sorti cette année.

La charmante et malicieuse Claire Boucher signe avec cet album un chef-d'oeuvre beau et complexe, naviguant entre pop immaculée et expérimentations électroniques. Rêveuse et sournoisement psychédélique, Grimes envoûte jusqu'à l'hypnose et accueille chaleureusement l'auditeur dans un univers infiniment riche, dans lequel convivent les délires mystiques de la demoiselle. Depuis l'astrologie et les aliens jusqu'aux légendes orientales et l'utilisation de langages cryptiques, le surréalisme romantique de Grimes ne peut en réalité qu'être attrapé en vol, saisi dans sa globalité l'espace d'un instant éphémère, et ce, pour citer l'ami Rimbaud, seulement via un long, immense et déraisonné dérèglement de tous les sens...

Un très très grand album.



2. Spiritualized - Sweet Heart Sweet Light

Définitivement de retour aux affaires, Jason Pierce et ses comparses signent avec cet album un monument de rock électrique et racé pour amateurs de rock élégant. Le gospel et les chants religieux sont comme d'habitude convoqués, de même que le Velvet Undergound, les Jesus & Mary Chain et Galaxie 500; même Jimi Hendrix et les Rolling Stones de Let It Bleed sont là!

Dans la tradition des grands disques de Spiritualized, on retrouve Pierce et sa voix cool as fuck, et on jubile quand viennent les instants de psychédélisme intenses qui rappellent les fantômes de Spacemen 3, les moments d’apaisement salvateurs, ceux de grandiloquence à base de choeurs et de cordes...

Un album magnifique qui redonne définitivement foi dans le rock'n'roll.



3. Air - Le Voyage Dans La Lune


Absolument aucune des publications qui ont présenté leurs tops de fin d'année n'ont mentionné ce disque. C'est bien dommage puisque la BO du film restauré de Georges Méliès, Le Voyage Dans La Lune, est un grand disque; rêveur, onirique et beau comme dans les grands moments d'Air.
On n'avait en effet plus vu notre duo électronique français préféré aussi en forme depuis le génial Talkie Walkie, sorti en 2004, il y a 8 ans déjà.
Aucun grand single à nous mettre sous la dent ici pourtant, mais simplement un disque ultra-cohérent qui illustre à la perfection le chef-d'oeuvre de Georges Méliès.
Avec ou sans le film, un album à découvrir d'urgence.



4. Lower Dens - Nootropics


Ce frisson existentiel cold-wave, on ne l'avait plus vraiment ressenti depuis longtemps. Depuis Interpol, Arcade Fire ou The XX, aucun groupe n'avait vraiment osé creuser dans cette direction avec succès. The Horrors? Que nenni. Avec cet album qui envahit lentement l'âme et laisse l'auditeur tout nu face à ses responsabilités, on ne peut que s'incliner et approuver avec tristesse la beauté incandescente de ce premier essai des très prometteurs Lower Dens. On attend désormais la suite avec impatience.



5. Tame Impala - Lonerism



Dans les traces du psychédélisme des Beatles de Revolver, Tame Impala révèle au grand jour la richesse de sa palette et son attrait pour les mélodies et les chansons alambiquées. Un disque inventif et très puissant qui ne va qu'en s'améliorant avec les minutes qui défilent.



6. How To Dress Well - Total Loss


C'est un bien étrange album qui vient se loger à la 6ème place du classement. D'abord qualifié de "R&B Lo-fi", la musique de How To Dress Well évolue sur cet opus magistral vers un R&B d'église, très épuré, immaculé, mélancolique, presque lounge, aux atmosphères enivrantes de beauté...
Un ovni à découvrir d'urgence.




7. Sufjan Stevens - Silver & Gold: Songs for Christmas


Plus les années passent, plus Sufjan Stevens semble s'enfoncer dans une douce folie technicolor. Après le démentiel et électronique Age of Adz, Sufjan revient avec un triple EP (!) uniquement composé de chants de Noël (!!!). Certains sont des chants traditionnels, d'autres des compos originales de l'uluberlu, et on est frappé par la qualité du résultat, fuzzy, chaleureux, pas niais pour un sou, enjoué, mais avec une touche salvatrice de mélancolie.
Encore un grand album dans l'escarcelle du grand Sufjan Stevens.





8. The Brian Jonestown Massacre - Aufheben


Anton Newcombe nous revient avec un disque particulièrement inspiré, sur lequel il laisse tomber quelques éléments pénibles du moyen Who Killed Sgt. Pepper? pour mieux se recentrer sur ce qu'il sait faire de mieux: un psychédélisme euphorisant fortement influencé par les maîtres étalons 60's et 70's du genre, le tout teinté de touches orientales et modernistes fascinantes. Les chansons s’enchaînent avec grâce et laissent entrevoir de belles mélodies et des idées en pagaille.
Comme quoi, quand le génie indomptable de Newcombe parvient à être un minimum contenu, le Brian Jonestown Massacre nous fait toujours planer aussi haut.



9. The Shins - Port Of Morrow


Les Shins nous avaient quitté trop longtemps, mais personne ne les avait vraiment oublié, car sur la foi d'un premier album sublimement pop, le groupe avait définitivement marqué toute une génération confectionneurs de mélodies en herbe.
Avec Port Of Morrow, la bande renoue avec un sens mélodique inné pour pondre des chansons réjouissantes, très influencées par le rock britannique moderne, définitivement entraînantes et pas redondantes pour un sous.



10. The Beach Boys - That's Why God Made The Radio


Alors là... Voilà un disque qu'on n'aurait jamais imaginé. On n'y avait même pas pensé à vrai dire. Réunir tous les Beach Boys survivants et sortir un album original... Et le pire c'est que ça marche!

Alors que paraissait encore récemment les rééditions orgiaques du chef-d'oeuvre absolu qu'aurait du être Smile, la bande au complet se réunissait pour accoucher d'un album étonnamment beau, pleins de mélodies accrocheuses et pas ridicules du tout. Les rois de l'harmonie vocale n'ont rien perdu de leur génie et nous offrent quelques vocalises sublimes, avec des chansons joyeuses et entraînantes comme au bon vieux temps de Today!.

Alors bien sûr on ne tient pas ici un nouveau Pet Sounds, et on soupçonne une influence prépondérante de Mike Love sur les compos du groupe au détriment du perturbé Brian Wilson, mais quand même. On tient là un excellent album des Beach Boys. Ce n'est pas rien.



11. Ty Segall & White Fence - Hair





12. Tennis - Young And Old




13. Daniel Johnston - Space Ducks Soundtrack


Daniel Johnston est depuis toujours un fou de comic books. Quand enfin il eut les fonds et l'opportunité de réaliser son rêve, à savoir publier sa propre bande dessinée, l'occasion était trop belle pour ne pas mettre en musique ce beau projet. Et de quelle manière ce fut fait! Accompagné de plusieurs invités de marque, Daniel Johnston semble plus en forme que jamais et compose des morceaux joyeux et toujours sublimes d'un point de vue mélodique.
Encore une fois, absolument personne ne parle de cet album... On tient là pourtant un disque infiniment plus beau que toutes les crottes pop/R&B méga-surestimés du moment.



14. Woods - Bend Beyond





15. Chromatics - Kill For Love




16. Chapelier Fou - Invisible




17. M. Ward - A Wasteland Companion




18. Edward Sharpe And The Magnetic Zeros - Here




19. The XX - Coexist




20. Cat Power - Sun



Mentions spéciales: Alabama Shakes, Breakbot, Perfume Genius, Dinosaur Jr, Japandroids, Sharon Van Etten, White Fence, Alt-J, Jack White, Fiona Apple, John Talabot, Electric Guest et Beach House.

samedi 8 décembre 2012

Quelques perles oubliées

Après cette longue absence, je souhaitais m'attarder un peu sur quelques vieux albums qui me tiennent particulièrement à coeur et dont bien peu de monde parle aujourd'hui...
Ce ne sont pas des albums particulièrement durs d'accès pourtant. Et ceux qui les ont conçu ne sont pas non plus des grands inconnus pour ceux qui s'intéressent un peu à l'histoire du rock indépendant. Mais le temps a fait son oeuvre et ces disques sont passés à la trappe. Dommage pourtant puisqu'il y a là dedans de quoi tenir des années.

Felt - Me And A Monkey On The Moon
(1989)


On aurait pu évoquer le son de guitare cristallin et divin de Maurice Deebank, ces mélodies tissées avec une délicatesse infinie... Mais pas ici, puisqu'à ce stade, le guitariste génial a déjà quitté le groupe depuis bien longtemps. Me And A Monkey On the Moon est en fait le chant du cygne de Felt, puisqu'il s'agit du dernier album publié avant le split, en 1989, respectant ainsi les volontés délirantes de son leader maximo, Lawrence, qui voulait publier 10 albums en 10 ans avant de saborder le groupe.

Toujours mené donc par l'impérial Lawrence et son phrasé très caractéristique, la bande avait commencé à évoluer, depuis le chef d'oeuvre Forever Breathes The Lonely World, vers un format beaucoup plus pop. Laissant de côté les longs instrumentaux basés sur les prouesses guitaristiques de Deebank, Felt s'ouvrait de plus en plus aux claviers (piano, orgue, synthétiseur) grâce au génie de Martin Duffy, 20 ans à peine à l'époque.

Du côté de l'humeur, alors que le groupe continue de s'enfoncer dans un anonymat désespérant compte tenu de son potentiel immense, les mélodies semblent ici plus enjouées que jamais. Lawrence a la tête dans les étoiles et rêve d'amour infini en célébrant la vie, le soleil et la liberté. Le tout pour un résultat d'une beauté précieuse, spleenesque, lumineuse et presque réconfortante.

Alors bien sûr, on aurait pu parler ici de Poem of the River, dans le même veine et sublime également, du classique Forever Breathes The Lonely World, de l'immaculé et toujours fascinant The Splendour of Fear, ou encore du renversant et psychédélique Ignite The Seven Cannons... En fait, quasiment tous les albums de Felt sont des chefs-d'oeuvre. Il ne tient qu'à vous de foncer tête baissée dans leur discographie et ne jamais en ressortir.

Felt - I Can't Make Love To You Anymore


Felt - Free



Spiritualized - Pure Phase
(1995)



Le deuxième album de Spiritualized, Pure Phase, fait partie de ces disques tellement fous qu'il est impossible de le comprendre d'emblée. Trop grand, trop immense, trop ambitieux. Fondé sur les cendres encore fumantes des hautement légendaires Spacemen 3 et mené par Jason Pierce, la formation avait déjà publié d'entrée un coup de maître: Lazer Guided Melodies. Elle revient aux affaires 3 ans plus tard avec la même conviction et un album encore plus impressionnant.

Pure Phase est en fait l'album où Jason Pierce fait vraiment étalage de toute sa virtuosité pour la première fois, en incorporant dans sa musique cordes, cuivres et claviers avec une maîtrise proprement hallucinante. La largeur de sa palette n'a alors aucun équivalent dans le monde du rock. Pourtant à l'époque, personne n'a rien à foutre de Spiritualized, les ventes de cet album seront d'ailleurs mineures. La même année, Sparklehorse publiait également un chef-d'oeuvre absolu dans l'indifférence générale... Drôle d'époque donc, mais passons.

Dans Pure Phase, l'ampleur des drones shoegaze n'a d'égale que la splendeur des mélodies qui se métamorphosent et prennent des accents pop ou psychédéliques l'espace d'une chanson. Il est peu dire qu'on a depuis bien longtemps quitté la terre ferme et que toute cette magie nous a emmené très loin dans une autre galaxie.
On retrouve dans ce disque des solos de guitares électriques tellement impensables qu'on croit presque apercevoir le fantôme d'Hendrix jammer avec celui de John Cipollina le temps d'une chanson (These Blues). Ceux-ci s'évanouissent délicatement dans la nuit et laissent la place à une complainte sublime (Let It Flow), presque gospel, et tout semble naturel. Et tout l'album est comme ça, que d’enchaînements comme ceux-ci, incompréhensibles mais merveilleux pourtant.

Mais rien se sert de trop s'étendre, il vous suffit d'aller faire un tour sur Youtube, Grooveshark, Spotify ou Deezer pour vous rendre compte de toute cette magie par vous même.

Spiritualized - Pure Phase (l'album en entier!)


Spiritualized - Let It Flow



The Magnetic Fields - Get Lost
(1995)



Le succès des Magnetic Fields était resté très confidentiel au début des années 90.

Dans les deux premiers albums du groupe, Distant Plastic Trees et The Wayward Bus, Merritt faisait pourtant preuve d'une créativité débordante, avec des disques denses, bouillonant d'idées et de sons originaux. Les fans hardcore du groupe préfèrent d'ailleurs souvent ces deux albums à tous les suivants, voyant à travers ceux-ci les représentants parfaits de la beauté synthétique et romantique que pouvait atteindre Merritt dans sa prime jeunesse.

Avec The Charm Of The Highway Strip, Merritt commençait à prendre les choses en main vocalement mais cet album n'était pas son meilleur, pas le plus inspiré.
Avec Holiday par contre, les Magnetic Fields trouvent la formule gagnante. On aurait pu parfaitement parler de ce disque, un autre chef-d'oeuvre oublié dans les méandres de l'histoire de la pop, mais on a choisit le suivant, Get Lost, publié en 1995.
L'émotion restait néanmoins, je trouve, terrée derrière la voix froide et détachée de Susan Anway et les synthétiseurs, qui, volontairement, sonnaient très Lo-fi, paraissent aujourd'hui assez machinales et déshumanisés.

Get Lost est en réalité le premier album des Magnetic Fields où Stephen Merritt commence à s'éloigner un peu de cette synth-pop qui a fait les beaux jours des premiers albums du groupe et commence à prendre le micro d'avantage. L'album sonne ainsi plus personnel que jamais et n'en devient que plus touchant.

La poésie romantique de Merritt s'exprime ici avec une honnêteté teintée d'ironie qui deviendra la marque de fabrique du groupe, surtout à partir du prochain disque, l'inégalable 69 Love Songs.

C'est en fait avec Get Lost qu'on obtient les premières vraies belles complaintes classiques de Merritt qui, loin d'abandonner l'idée des synthés et du chant maniéré et baroque des opus précédents, va l'adoucir via des chansons auxquels l'auditeur de base s'identifie plus facilement. On est au final touché directement au coeur avec des pépites comme Why I Cry ou With Whom To Dance?, qui voient Merritt offrir parmi les mélodies les plus sublimes de sa vie.

The Magnetic Fields - With Whom To Dance?


The Magnetic Fields - Why I Cry (Live)

mardi 10 juillet 2012

Grimes

Quelle délicieuse découverte que la charmante Grimes, petit joyau Canadien aux charmes psychédéliques insoupçonnés.
Toute musique a une histoire qu'elle conte involontairement. L'histoire de Grimes est celle de la rose à l'apparence candide et aux épines redoutables, celle du serpent ensorceleur qui attire et hypnotise pour mieux mordre. Les chansons ici présentes déversent leurs venins existentiels perturbants derrière des nuées de mélodies pop, une voix virginale et une bouille de gosse angélique. Le tout sans être pompeux. Un véritable exploit.


Claire Boucher de son vrai nom est en fait l'une des sensations indie/hipster/underground de l'année, après deux albums parus coup sur coup en 2011 qui laissaient beaucoup augurer. Celle-ci est revenue cette année avec un album plus abouti que jamais, d'une maîtrise assez incroyable à vrai dire après deux essais valeureux.


Avec de belles nappes de synthés et une musique électronique plus planante que jamais, Grimes avait impressionné son monde du haut de cette musique synthétique et organique, à l'émotion souterraine impalpable mais terriblement distinctive. Il faut dire que Grimes sonne comme peu de chose connu, avec ces bouts de mélodies pop bien cachés derrière des boucles psychés que n'auraient pas renié Aphex Twin. Un réel ovni mais en même temps une évidence limpide dans une génération où pop et musique électronique ne cessent d'emprunter l'une à l'autre, rendant les frontières de plus en plus floues.


Tout chez Grimes semble tendre vers l'évocation d'une sensation, d'une image, pas même d'une idée, encore moins d'un récit, avec une fragilité enfantine. Air période "Sexy Boy" rôde et on sent le potentiel immense qui se dégage de la gamine. Au charisme fou. Il n'y a qu'à voir sur scène, elle a la gueule et l'accoutrement pour le taf.


On ne peut donc que lui souhaiter le meilleur et écouter encore une fois sa dernière livraison, son meilleur album à ce jour, l'exceptionnel Visions.

Grimes - Oblivion

Grimes - Vanessa

Grimes - Genesis (Live)

Grimes - Symphonia IX (My Wait Is U) / Genesis / Be A Body


samedi 12 mai 2012

The Smashing Pumpkins - Siamese Dream


Il fallait que je revienne vers vous puisque je suis actuellement totalement obsédé par le deuxième album de ces maudits Smashing Pumpkins, à savoir Siamese Dream.

En fin d'année dernière, les deux premiers albums du groupe de Billy Corgan était réédités dans des versions luxueuses, agrémentés de moult inédits et versions alternatives. Bizarrement, le gros classique du groupe, l'éléphantesque Mellon Collie and The Infinite Sadness, échappait à la vague. Pas grave, l'occasion était déjà trop belle pour se replonger dans l'univers si particulier des Citrouilles.

Encore aujourd'hui, le groupe divise. Certains, des bons (M83, The Pains Of Being Pure At Heart) comme des mauvais (My Chemical Romance), les célèbrent allègrement, tandis que d'autres (les géniaux Pavement...) les crucifient avec tout autant d'enthousiasme. Qu'en est-il réellement?

Tout d'abord, il faut bien avouer que le groupe sonne toujours très "d'époque". Ça sent les 90's à plein nez. Ça plaira donc évidemment aux nostalgiques de cette époque bénie du rock indé, mais moins à ceux qui s'attendent à ce qu'un disque sonne toujours pertinent à travers les époques. La voix de Corgan déjà, maniérée à l'extrème, a pu en irriter plus d'un à travers les âges... Pourquoi se croit-il obligé d'en faire 10000 tonnes? Le fait-il exprès? Si oui pourquoi? Est-il schizophrène? Etc, etc... Des questions qui continueront à agiter nos futures têtes blondes dans les siècles avenir, on n'en doute pas.

Mais à vrai dire, même si on sent bien que le tout a beaucoup vieilli, la deuxième galette du groupe, Siamese Dream, reste un disque profondément exceptionnel et hors-norme, témoignant à la perfection des états d'âme et du son d'une certaine génération... Il y a sur cet album une transcendance sublime du vague à l'âme teenage qui ne pourra jamais laisser de marbre.
Et puis il y a surtout des compositions d'une mélancolie et d'une tristesse déjà infinies, en même temps que des mélodies solaires, des cassures soniques détonantes (et révolutionnaires à l'époque), des sons novateurs, une instrumentation virtuose (voir les violons de Disarm) et une sorte de cohérence totale dans l'univers et le message, et ce tout du long d'un album hautement varié.
Alors on aura beau haïr la voix de Corgan, on aura beau avoir conscience que celui-ci se prend très très (trop) au sérieux depuis bien trop longtemps, on aura beau vomir les fringues ridicules que celui-ci portait dans les 90's, et pour finir on aura beau aimer jusqu'à la mort Pavement, il faut bien avouer que Siamese Dream est un putain d'album d'une beauté fulgurante et rare.

On connaît la suite, on connaît l'histoire. Après un projet gargantuesque de double-album marqué par quelques chansons éternelles (1979, l'une des plus belles chansons jamais composée), un succès monstre auprès d'une large frange de la jeunesse rebelle du milieu des 90's, le groupe se dissoudra peu à peu et n'atteindra plus jamais le niveau de Mellon Collie.
Restera de tout ça deux albums magnifiques, qui auront de quoi faire rêver les kids pendant encore un petit bout de temps.

Today

Disarm


Cherub Rock


dimanche 22 avril 2012

Sorties d'albums: Spiritualized, Shins et Magnetic Fields

De retour après une longue absence, je vous propose un point sur toutes les sorties d'albums récentes un tant soit peu excitantes!
Au menu donc, Spiritualized, The Magnetic Fields et The Shins.
Je parlerai des albums de Daniel Johnston, Damon Albarn et Jack White dans le prochaine épisode!

Spiritualized - Huh?

Et on commence avec certainement le meilleur disque du lot. Celui du retour de Spiritualized et de son leader cramé Jason Pierce avec un album qui tutoie la perfection. Le groupe n'avait jamais cessé d'être formidable mais revient ici à un niveau hallucinant, carrément digne du chef d'oeuvre absolu de 1997, Ladies & Gentlemen We Are Now Floating In Space. Le son est d'une pureté immaculée et les chansons... Bon sang! On a l'impression d'être en présence d'une sorte de Velvet Underground du 3ème millénaire, manifestement rock, planant, toutes guitares chatoyantes devant... Les mélodies et l'émotion sont évidemment au rendez-vous et s'expriment sur des longues plages psychédéliques qui laissent tout le temps à l'auditeur de s'imprégner jusqu'à la moëlle de cet univers distordu, étrange et sublime à la fois... Rien à dire, un titre d'album tout pourri, mais un très grand disque!

So Long You Pretty Thing


The Shins - Port Of Morrow


On continue avec l'excellent nouvel album des biens-aimés Shins. Là aussi, le groupe renoue avec sa gloire passée grâce un album ambitieux qui marque un vrai renouveau dans l'univers pop mélodique de James Mercer. Ça faisait 5 ans quand même qu'on avait plus de nouvelles des Shins, l'attente était donc fébrile avant la sortie de cette nouvelle galette. Oubliez donc Broken Bells, désormais c'est bien sur les Shins qu'il faudra compter! Concrètement, cet album est plein de couleurs et d'énergie, le genre à vous aider à vous lever le matin quand c'est pas facile. Providentiel donc.
Vous n'avez qu'à écouter ce feu d'artifice qu'est Simple Song (ci-dessous) si vous ne me croyez pas.

Simple Song




The Magnetic Fields - Love At The Bottom Of The Sea


Venons en à présent au cas des Magnetic Fields.
Vous avez dû le remarquer, le groupe de Stephin Merritt fait parti de mes artistes préférés de tout les temps de l'univers entier ever. L'attente était donc immense. Certes. Mais il faut bien avouer qu'au final j'ai été un peu déçu par la nouvelle livraison, qui répond au doux nom de Love At The Bottom Of The Sea. L'idée était de revenir au son 90's des Magnetic Fields avec le comeback au premier plan des synthétiseurs. Très bien. J'était pas emballé par l'idée à la base, mais bon, passons.
Le problème est qu'absolument rien de neuf n'est proposé ici. On entend effectivement des synthés partout qui sonnent très 90's, en effet, et l'ensemble sonne comme un truc moyen que Merritt aurait pu publier au début de sa carrière. Alors que depuis le sommet absolu qu'était 69 Love Songs celui-ci explorait toujours de nouveaux territoires tout en produisant de sublimes mélodies, ici on a vraiment l'impression d'être confronté à du déjà-vu au niveau sonique. Pour ce qui est des chanson, ben ça vaut pas ce qui a été publié ces dernières années. L'album vogue entre chansonnettes guillerettes qui se laissent écouter et d'autres qui tournent carrément à vide.
Après l'album n'est pas non plus dégueulasse, on s'y retrouve évidemment sur quelques belles complaintes, mais dans l'ensemble, on attendait plus de ce bougre de Stephin Merritt. Dommage.

Andrew In Drag


samedi 17 mars 2012

Une innocente petite collection de jolies chansons

Désolé pour cette longue absence, mais beaucoup de choses se son bousculées récemment... Maintenant que j'ai un peu le temps, voici une petite playlist de chansons qui me font vibrer ces derniers temps.

On commence avec Toby Foster, certainement un illustre inconnu pour vous, mais assurément un garçon qui ne manque pas de talent lorsqu'il s'agit de déballer son coeur sur des comptines antifolk autobiographiques de deux minutes... Comme un petit frère talentueux de l'immense Paul Baribeau, avec une tête de Conor Oberst geek. Et puis ce jeu de guitare percussif, définitivement hors du commun, ne fait qu'ajouter au bonheur d'écouter ce jeune homme d'une honnêteté renversante... A découvrir au plus vite.

Toby Foster - Speech Patterns (Live)

Dans un style beaucoup plus cool et moins émotionnel, les Teenage Cool Kids portent vraiment bien leurs noms... Dans ce style jouissif qui nous rappelle intensément Pavement, les Silver Jews ou Beat Happening, ces deux jeunes glandeurs font mouche avec une décontraction et une simplicité étonnante. (Merci aux Pink Couch Sessions au fait...!)

Teenage Cool Kids - Landlocked State

Rien à voir maintenant puisqu'on part sur les terres de l'abstract avec l'exceptionnellement trippant Quantic, alias Will Holland, pour une boucle mélodique enivrante, déprimante, obsédante... "Time Is The Enemy", on comprend tout immédiatement, pourtant il n'y a aucune parole...
Et puis la combinaison avec la vidéo est juste parfaite.

Quantic - Time Is The Enemy

A défaut d'avoir adoré le dernier Magnetic Fields, je vous propose une petite perle d'un des nombreux autres groupes de Stephin Merritt. Ici, il s'agit des 6ths, avec cette ballade amoureuse d'une pureté solaire. Détendez-vous et appréciez (et non vous ne mangerez pas de Mentos, merde!!!).

The 6ths - You You You You You

Que diriez-vous à présent d'un peu de jazz-rap? Je vous propose ce qui se fait de mieux dans le genre. A déguster ci-dessous.

Chief feat. John Robinson - Jazz Unconditional

Et puis voici une vidéo qui vous donnera un aperçu la folie Flaming Lips en concert... Complètement barré, le groupe de Wayne Coyne s'emploie pour faire de chacun de ses concerts une immense orgie collective qui tournerait systématiquement en une gigantesque fête multicolore à grand renfort de ballons, confettis, strapontins, chanteur dans une bulle, et autre joyeusetés.

The Flaming Lips - Worm Mountain (Live Glastonbury 2010)

dimanche 5 février 2012

Did you just say "Folk?!!!"

Voici une toute nouvelle rubrique que j'inaugure aujourd'hui et qui a pour but de vous faire découvrir à chacune de ses apparitions quelques morceaux folk au sens large, c'est à dire des chansons souvent guitare-voix et souvent "mélancoliques".

Commençons donc avec le tout nouveau morceau d'un de mes folkeux préférés de ces 20 dernières années : le tendre M. Ward et sa voix de miel. La chanson ici présente vient de sortir et annonce l'album qui est sensé suivre et qu'on attend dores et déjà de pied ferme. Cette sublime chanson nous rappelle au passage pourquoi on aime tant M. Ward : ses ballades atmosphériques et comateuses sont pratiquement ce qui se fait de mieux pour rêvasser au soleil l'été au bord d'un ruisseau. Rien que pour ça, merci Mister Ward.

M. Ward - The First Time I Ran Away



Plus les années passent et plus je bénis cette Terre de nous avoir donné la Blogothèque et ses Concerts à Emporter. Ceux-ci donnent parfois (souvent) lieu à des choses carrément intemporelles, comme ce moment magique capté par l'équipe de Frenchies avec Kurt Vile et ses acolytes chevelus. Ici l'histoire du "business man" sera sujette à des fantasmes divers et variés... Mais c'est ça aussi l'art: le don de faire rêver les gens à partir de pas grand chose.
A déguster sans modération.

Kurt Vile - Baby's Arms (Live)



Puisqu'on parle de la Blogothèque, autant continuer! Ici, ils ont réussit à capter le génie derrière Iron & Wine, Sam Beam, qui signe devant leur caméra un Tree By The River à faire pleurer un âne mort.

Sam Beam (Iron & Wine) - Tree By The Water (Live)


Et puis pourquoi ne pas se référer au maître de tous les folkeux qui se respectent? J'ai nommé Bob Dylan qui interprète ici devant un Donovan médusé une superbe version d'une des chansons les plus sublimes du songwriter : la peu connue Love Minus Zero / No Limit.

Bob Dylan - Love Minus Zero / No Limit (Live)


Enfin pour finir, quelque chose de particulièrement intense. On atteint ici des sommets d'émotion et de tristesse. Brut, fin, intense et beau en même temps, Conor Oberst, tête pensante de Bright Eyes, est ici au sommet de son art et délivre une version bouleversante de son "Waste of Paint".

Bright Eyes - Waste Of Paint (Live)


P.S.: Préparez-vous à l'arrivée du nouveau Magnetic Fields, c'est pour bientôt! Youpiiiii!!!
P.S.(2): Le dernier album d'Air, bande-son de la version restaurée du film Le Voyage Dans La Lune de Méliès, est très beau.

mercredi 25 janvier 2012

Elliott Smith

Je n'avais toujours pas mentionné Elliott Smith dans ce blog, il était donc grand temps de réparer cette injustice...

Le songwriter le plus perturbé de notre génération est parti depuis déjà plus de 8 ans, pourtant son âme n'a jamais semblé briller aussi fort qu'aujourd'hui... Les gens se reconnaissent dans Elliott Smith, ses chansons ont pris un sens dans leurs vies, certaines sont devenues de véritables monuments, et l'existence saisissante de leur créateur a ému plus d'un coeur fragile.

Du coup, Smith, relativement ignoré il y a une quinzaine d'années, est aujourd'hui devenu un barde folk établit, autorisé à la table des grands : Will Oldham, Nick Drake et autres folkeux mélancoliques légendaires. Pourtant, un aspect de son songwriting le distinguait fondamentalement de ces deux grandes figures : au-delà de l'attachement aux racines folk américaines très rurales (le jeu de guitare tout en arpèges et en picking notamment), la musique du garçon intégrait une énorme influence pop. Les Beatles, Big Star ou les Kinks seront tous repris à un moment ou un autre, prouvant l'attachement essentiel du songwriter pour la grande pop héroïque de ces quelques groupes mythiques. Smith confectionnait ses chansons à la manière d'un orfèvre aux mains délicates, façonnant un travail d'une complexité et en même temps d'une évidence affolante, laissant derrière lui un énorme stock de mélodies à faire tourner les têtes de tous les maniaques de pop ouvragée.

Mais au delà de ces aspects de composition, Elliott Smith était surtout et avant tout un jeune homme extrêmement fragile, dont les émotions brutes s'exprimaient à merveille à travers cette voix sur le fil, qui semblait prête à dérailler ou à partir en sanglots à tout moment.

L'addiction aux drogues, la dépression, la solitude, la paranoïa, le traumatisme des Oscars, tout ça se ressentait d'une manière totalement bouleversante dans ses chansons. Mais c'est surtout l'honnêteté profonde qui transparaît dans l'ensemble de l'oeuvre qui a beaucoup marqué, évidemment. Elliott Smith décrivait avec la plus grande innocence les sentiments les plus purs qui animait son coeur tourmenté, et livrait alors une copie totalement déstabilisante et poignante.
La sensibilité à fleur de peau de Smith devint alors et reste encore aujourd'hui pour des milliers de personnes un réconfort permanent dans un monde de plus en plus pourri par un cynisme désespérant.

Voici donc 12 de mes chansons préférées d'Elliott Smith. Il y a déjà rien que là-dedans de quoi survivre des années entières dans un bunker souterrain à étudier nuit et jour ces chansons incroyables.
A consommer avec modération tout de même, ces titres pouvant entraîner crises existentielles et folies temporaires...

The Biggest Lie


Angeles


Say Yes


Between The Bars


Whatever (Folk Song In C)


All Cleaned Out


Georgia Georgia


Waltz #2


Miss Misery


Needle In The Hay


Twilight


Happiness

dimanche 1 janvier 2012

Perles Pop (2)

Voici la deuxième édition de la rubrique "Perles Pop"! Avec du très très lourd cette fois-ci. Vraiment, là, j'y ai mis tout mon coeur.

Big Star - Thirteen

Voici la ballade la plus sublime du groupe de Chilton et Bell, pourtant pas avare en la matière. Cette complainte d'une beauté et d'une innocence incroyable atteint un tel niveau de perfection qu'elle rendrait fous de jalousie tous les Paul McCartney, Brian Wilson ou Ray Davies du monde. Une preuve de plus, s'il en fallait une, du génie absolu de Big Star.




Felt - The World Is As Soft As Lace

Il faudrait un jour que j'évoque ici plus en détails mon amour infini pour le groupe de Lawrence... Cet ovni totalement oublié des années 80 a laissé derrière lui une oeuvre immense, 10 albums et 10 singles en 10 ans. Parfait même dans les chiffres. Au fil des années, on a vu Felt tout faire, des albums instrumentaux, d'autres définitivement pop, certains carrément psychédéliques...
Ce bijou n'est qu'un exemple parmi d'autres du génie absolu du guitariste originel de la bande, Maurice Deebank, qui tresse ici une mélodie d'une beauté solaire, avec un son d'une pureté inimaginable... Tout ici est très caractéristique du quasi-instrumental second album du groupe, l'excellentissime The Splendour Of Fear.
Il suffit de tendre l'oreille. C'est cadeau. (Et ça démarre à 1:00).




Chris Bell - You And Your Sister

En solo, l'ex Big Star est célèbre pour avoir publié un album inouï: I Am The Cosmos, album à la beauté fulgurante qui finira de faire rentrer Bell dans l'histoire de la pop music. Ici aidé par son ancien compère Alex Chilton aux choeurs (qui à la même époque venait d'ailleurs d'achever un chef-d'oeuvre immense pour Big Star, l'album Third/Sister Lovers), Chris Bell produit avec ce "You And Your Sister" divin une ballade pop d'une pureté renversante.
On sait ce qui arrivera ensuite... Fauché à 27 ans, comme bien d'autres génies avant lui. Dommage que le monde l'ait oublié, il méritait infiniment mieux.




Dennis Wilson - River Song

Après un ex-Big Star en solo, voici un ex-Beach Boys en solo! Et par n'importe lequel: Dennis Wilson, le seul vrai surfeur de la bande, écorché vif loin de l'image de bons garçons des Beach Boys, sortait en 1977 l'album Pacific Ocean Blues. Un disque complexe, sublimement pop et hautement dérangé, marqué par la drogue, mêlant d'étranges éléments électroniques à des choeurs et des mélodies parfois célestes. Redevenu célèbre après sa réédition en 2008, l'album n'est pourtant pas à mettre entre toutes les mains... Quoi qu'il en soit, voici l'une des plus belles compositions du disque. La très grande River Song:




The Pastels - Million Tears

Les gentils Pastels sont victimes d'un véritable culte auprès de quelques amateurs de pop indé. Assez représentatifs du son twee pop et C86, le groupe se distinguait cependant des autres par un charmant côté amateur et DIY qui font d'eux une formation assea à part dans le paysage musicale de l'époque. Admiré par quelques grands groupes, restés pourtant quasi-inconnus du grand public, les Pastels développèrent un son toujours assez Lo-Fi qui ira du rock saturé à la pop la plus ensoleillée, comme ici avec Million Tears.




The Vaselines - Jesus Wants Me For A Sunbeam

Oui oui, on sait, c'était un des groupes préférés de Kurt Cobain. Le leader de Nirvana ne cessait d'ailleurs de reprendre cette chanson en live, notamment lors du MTV Unplugged, dans une très belle version. On ne remerciera donc jamais assez Cobain pour avoir essayé de faire découvrir au public des artistes sublimes auxquels il devait beaucoup: Daniel Johnston, Dinosaur Jr, Pixies, et donc Vaselines...
Ici on vous propose l'originale de ce superbe groupe mixte qui jouait une pop assez approximative et Lo-Fi mais toujours mélodique et réjouissante.




Belle & Sebastian - Another Sunny Day

Le groupe des coeurs sensibles et des incurables romantiques est aussi une bande de lascars qui connait sa pop sur le bout de ses doigts et sait publier des morceaux au savoir-faire mélodique impeccable. L'exemple ici même:




Galaxie 500 - Tell Me

Enfin pour finir l'un des groupes les plus fulgurants du monde. Actifs à peine 4 ans, de 87 à 91. Auteurs d'un premier album quasi-parfait (Today), d'un deuxième insurpassable (On Fire) et en enfin d'un dernier bon disque (This Is Our Music). Connu pour ses épures pop, lentes et méditatives, au son si clair qu'il tutoyait les cieux, le groupe s'écoute comme un émerveillement permanent. Là encore un très grand groupe oublié, un vrai diamant intact. Je vous laisse donc déguster ce Tell Me d'un autre monde:

The Field Mice et la Twee Pop

Passée la nouvelle année, on oublie les classements et autres tops proverbiaux et on revient à la musique! Youpi! Et pas avec n'importe qui, attention, puisque je vous parle aujourd'hui d'un grand groupe pop complètement oublié dans nos chères contrées: The Field Mice.

Les soyeux Field Mice étaient l'incarnation même du son Sarah Records, ce label formidable de Bristol qui publia d'innombrables disques de pop délicate de 1987 jusqu'au milieu des années 90 (dont les très bons Another Sunny Day).
Mais revenons d'abord si vous le voulez bien sur l'histoire de cette fameuse twee pop à laquelle Field Mice est souvent associée, afin de mieux comprendre le contexte dans lequel le groupe a émergé.

Le "son Sarah Records" est en fait historiquement une composante de ce qu'il convient d'appeler l'"indie pop" si on vient du Royaume-Uni, ou la "twee pop" si l'on est des États-Unis (ce dernier étant le terme le plus utilisé en France aujourd'hui).
Certains historiens pop retracent l'origine de la twee pop au 3ème album du Velvet Underground. D'autres prétendent que le mouvement prend ses sources au début des années 80 en Écosse, avec l'obscur label Postcard Records qui publiait des choses très influencées par le post-punk. Les autres influences officielles de cette future twee pop incluent quelques groupes post-punks, au premier rang desquels les superbes Television Personalities, et deux-trois punks anglais tels que les Buzzcocks et les Undertones. Une certaine idée de la pop commence alors à naître, avec l'éthique DIY (Do It Yourself), à laquelle ces gens adhèrent avec enthousiasme, encourageant alors la profusion de groupes plus ou moins amateurs.

Et puis milieu des années 80 les Smiths débarquent et popularisent une pop indépendante, sans la violence ni la distorsion des guitares rock mais avec les mélodies et les sentiments amoureux de la pop. Le succès du groupe de Morissey, et son aura auprès de toute une génération d'incorrigibles romantiques, est un peu la victoire, si l'on veut, des idées de tous ces groupes indie pop aux coeurs d'artichaut. La vénération dont va alors bénéficier le groupe, particulièrement forte en Angleterre, vire du coup parfois à une idolâtrie assez incroyable, quelque peu démesurée si on la compare par exemple aux échecs commerciaux retentissants de certains groupes magnifiques de la même époque, comme Felt. Les Smiths devinrent en tout cas un formidable exemple pour des dizaines de songwriters en herbe, donnant envie à de nombreuses jeunes pousses d'empoigner leurs guitares et d'écrire leurs propres chansons, à l'instar d'un Noel Gallagher fou amoureux du groupe.

Cependant, et je n'ai pas honte de le dire, comme de nombreuses personnes qui aiment la pop indé, je n'ai jamais vraiment partagé l'enthousiasme autour des Smiths, et ce malgré de nombreuses tentatives! Ce qui ne m'empêche pas de respecter le groupe et d'être en même temps un énorme fan de quelques quelques grandes formations sensées être plus ou moins proches des Smiths (Field Mice, La's, Felt, Big Star, Jesus & Mary Chain,...). L'un n'empêche pas l'autre, que ce soit clair!

En 1986 parait la légendaire cassette C86 du NME, qui réunit de nombreux artistes dits de "twee pop" (dont les très bons Wedding Present et les excellents Pastels, dont on reparlera ici plus tard) et qui servira parfois de nom générique à toute cette bande de joyeux lurons. La cassette, concrètement, contient une chanson des débuts de Primal Scream, de nombreuses autres de groupes devenus depuis totalement insignifiants, et pour finir n'est pas si "twee" que ça, puisqu'elle incorpore en vérité des groupes beaucoup plus musclés et rock que ceux de l'indie pop.

Finalement en 1987 sortent les premiers enregistrements de chez Sarah Records, qui continueront à fouiller du côté des mélodies fragiles et des paroles sensibles.
Tout cela, "indie pop", "twee pop", "C86 sound", "Sarah Records sound" (du plus général au plus particulier) désignent donc, grosso-modo, le même type de musique, une musique d'ailleurs cruellement oubliée en France.

Mais aujourd'hui des artistes talentueux font revivre cette vision de la pop avec brio: Belle & Sebastian évidemment, mais aussi les formidables Pains Of Being Pure At Heart sur leur premier essai et Real Estate à un degré moindre.

Et pour revenir aux Field Mice, les lascars ont publiés en 1989 un premier album d'une immense beauté, Snowball, remplie de mélodies intactes prêtes à prendre d'assaut nos coeurs fragiles. Les guitares sont aigrelettes, le vague-à-l'âme adolescent et hautement romantique est bien présent et la mélancolie hante de nombreuses compositions sur ce premier essai aux aspects de classique absolu. La bande évoluera par la suite vers un son plus électronique sur les deux essais suivants parus en 90 et 91 (à retenir: l'album Skywriting, celui de 90, extrêmement beau, le suivant l'étant un peu moins), et se séparera dans la foulée, après seulement 4 années d'activité.
Au final, ils auront laissés derrière eux une petite collection de chansons éternelles, comme ces deux bijoux ci-dessous:

The Field Mice - Emma's House


The Field Mice - If You Need Someone