dimanche 12 juin 2011

Ali Farka Toure & Toumani Diabate

Si la musique africaine regorge de trésors, elle n'en reste pas moins ici résumée à d'affreux clichés. L'Europe et la France auront retenu, avec l'émergence de l'abominable "World Music" dans les années 80, ces tubes "dansants" ridicules, pire que la pire production 80's signée George Michael, pleine de synthés dégoulinants et de lourdes basses, rappelant plus la mauvaise disco qu'autre chose. Le Brésil ou le Mali seront dès lors sur la carte du marché du disque, mais pour de très mauvaises raisons.

Parmi la musique authentique qui a su résister aux influences néfastes de la musique prête-à-jeter, il y évidemment eu le grand Ali Farka Toure. Lui a su s'ouvrir aux bonnes personnes aux bons moments: on pense bien sur à sa superbe collaboration avec Ry Cooder, ou son alliance avec le blues du génial Taj Mahal. Farka Toure relève les points de liaisons entre ces styles et les marient avec brio, et du coup le résultat sonne bien mieux que la fusion poussive de la "musique du monde".

Pour l'album dont on va vous parler ici, le vieux malien a encore sélectionné son acolyte avec soin: c'est avec son flamboyant compatriote Toumani Diabaté qu'il choisit de travailler en 2005 pour un disque exceptionnel, In The Heart Of The Moon. Diabaté est à la kora, Toure à la guitare, et la magie opère.
Le chant est à peine présent, l'album est essentiellement instrumental, le tout est joué avec des instruments tout à fait traditionnels, et on est sidéré par la cohérence et la magie de cette galette. Enfin un album moderne où on laisse le temps à la musique de respirer, on ne se presse pas, on laisse les ambiances et les atmosphères embaumer l'air et imprégner l'auditeur jusqu'à la moelle.
On pense ici à tout ce Mali fantasmagorique, aux grandes étendues arides, au désert Saharien, à l'espoir, aux doux souvenirs d'enfance, aux oasis, aux villages... Ce n'est pas qu'une simple rencontre, c'est un voyage initiatique qui transpire le Mali de tout ses pores qui est proposé ici.

La guitare de l'ancien est limite blues et la kora de Diabaté se révèle d'une finesse et d'une richesse assez incroyable. La kora tresse et enjolive de sublimes toiles de fonds tandis que la guitare de l'ancien bâtit et affirme les mélodies. Il en ressort au final une musique profondément émouvante, humaine et africaine.

Mais rien ne sert de trop en parler. Il suffit de tendre l'oreille:

Ali Farka Toure & Toumani Diabaté - Kaira


Ali Farka Toure & Toumani Diabaté - Debe


Ali Farka Toure - Gomni!

3 commentaires:

  1. Très instructif comme toujours, et très joliment écrit. C'est vrai que la soupe musicale exotique sortie pour le grand public a toujours repris la festivité de la musique africaine, mais en laissant de côté son authenticité.
    Kaira est un très beau morceau, je trouve que c'est un bon parangon du songwriting africain... On se croirait presque à voguer sur la pinasse de la pochette. Et les deux morceaux suivants sont aussi très intéressant dans le traitement des instruments traditionnels.
    D'ailleurs si je peux me permettre, tu peux jeter un coup d’œil au guinéen Ebo Taylor, qui a sorti un album encore l'année dernière (watch?v=LwHRi76Me98), qui est plus funk, au malawite Esau Mwamwaya, alias The Very Best, qui s'est acoquiné avec des producteurs électro (watch?v=nTpX1NpDSBw), ou même l'éthio-jazz de l'incontournable Mulatu Astatke (watch?v=9tERzH6wwOg).
    Enfin, moi quoi qu'il en soit je retourne écouter In the Heart of the Moon.

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  2. Hey! Merci pour les compliments once again!
    Mais permets toi donc! N'hésites surtout pas à me conseiller des noms, je vais écouter et je te dis ce que j'en pense!

    J'ai vraiment bien aimé Mulatu Astatke, bien spé, un espèce de mélange entre groove salsa et jazz, vraiment cool!

    'Tain ça fait des souvenirs celle de Very Best! Je sais pas si c'est l'un qui s'est inspiré de l'autre ou l'inverse, mais ça ressemble beaucoup à ma chanson préférée d'Architecture Helsinki (Heart In Races), un super groupe indé, qui sonne comme si Animal Collective n'était pas prise de tête! ^^ (watch?v=4602M6yj2-8)
    Quant à Ebo Taylor c'est très bon aussi, ça m'a fait pensé un peu à Fela...

    Bref faut que je creuse les 3, merci pour ces noms!

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  3. Yep, je connais Architecture in Helsinki, enfin juste l'album In Case We Die, que j'avais sur mon disque dur avant qu'il ne rende l'âme. C'était assez marrant comme musique, mais alors faut kiffer l'indie à fond pour le coup, haha.

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