lundi 17 décembre 2012

Top 20: Les meilleurs albums de 2012

Voici dores et déjà mon classement, le top 20, des meilleurs albums de l'année 2012 d'après mon humble-avis-subjectif-très-personnel-et-imparfait-qui-n'engage-que-moi.
Vu que j'ai été peu présent cette année, je vais tenter de me rattraper avec un beau top sorti de derrière les fagots rien que pour vous. Ce classement a vocation à être amélioré dans les prochains jours par les critiques des albums classés 11ème à 20ème. Mais je ne résiste pas à vous partager déjà le top.

Je tiens à préciser que j'ai exclu volontairement les albums rap, pour me concentrer sur les meilleurs albums en pop, rock, folk et électro.

En espérant que ça puisse vous permettre de découvrir deux trois trucs sympas.


1. Grimes - Visions


Certainement le disque le plus ambitieux et le plus impressionnant sorti cette année.

La charmante et malicieuse Claire Boucher signe avec cet album un chef-d'oeuvre beau et complexe, naviguant entre pop immaculée et expérimentations électroniques. Rêveuse et sournoisement psychédélique, Grimes envoûte jusqu'à l'hypnose et accueille chaleureusement l'auditeur dans un univers infiniment riche, dans lequel convivent les délires mystiques de la demoiselle. Depuis l'astrologie et les aliens jusqu'aux légendes orientales et l'utilisation de langages cryptiques, le surréalisme romantique de Grimes ne peut en réalité qu'être attrapé en vol, saisi dans sa globalité l'espace d'un instant éphémère, et ce, pour citer l'ami Rimbaud, seulement via un long, immense et déraisonné dérèglement de tous les sens...

Un très très grand album.



2. Spiritualized - Sweet Heart Sweet Light

Définitivement de retour aux affaires, Jason Pierce et ses comparses signent avec cet album un monument de rock électrique et racé pour amateurs de rock élégant. Le gospel et les chants religieux sont comme d'habitude convoqués, de même que le Velvet Undergound, les Jesus & Mary Chain et Galaxie 500; même Jimi Hendrix et les Rolling Stones de Let It Bleed sont là!

Dans la tradition des grands disques de Spiritualized, on retrouve Pierce et sa voix cool as fuck, et on jubile quand viennent les instants de psychédélisme intenses qui rappellent les fantômes de Spacemen 3, les moments d’apaisement salvateurs, ceux de grandiloquence à base de choeurs et de cordes...

Un album magnifique qui redonne définitivement foi dans le rock'n'roll.



3. Air - Le Voyage Dans La Lune


Absolument aucune des publications qui ont présenté leurs tops de fin d'année n'ont mentionné ce disque. C'est bien dommage puisque la BO du film restauré de Georges Méliès, Le Voyage Dans La Lune, est un grand disque; rêveur, onirique et beau comme dans les grands moments d'Air.
On n'avait en effet plus vu notre duo électronique français préféré aussi en forme depuis le génial Talkie Walkie, sorti en 2004, il y a 8 ans déjà.
Aucun grand single à nous mettre sous la dent ici pourtant, mais simplement un disque ultra-cohérent qui illustre à la perfection le chef-d'oeuvre de Georges Méliès.
Avec ou sans le film, un album à découvrir d'urgence.



4. Lower Dens - Nootropics


Ce frisson existentiel cold-wave, on ne l'avait plus vraiment ressenti depuis longtemps. Depuis Interpol, Arcade Fire ou The XX, aucun groupe n'avait vraiment osé creuser dans cette direction avec succès. The Horrors? Que nenni. Avec cet album qui envahit lentement l'âme et laisse l'auditeur tout nu face à ses responsabilités, on ne peut que s'incliner et approuver avec tristesse la beauté incandescente de ce premier essai des très prometteurs Lower Dens. On attend désormais la suite avec impatience.



5. Tame Impala - Lonerism



Dans les traces du psychédélisme des Beatles de Revolver, Tame Impala révèle au grand jour la richesse de sa palette et son attrait pour les mélodies et les chansons alambiquées. Un disque inventif et très puissant qui ne va qu'en s'améliorant avec les minutes qui défilent.



6. How To Dress Well - Total Loss


C'est un bien étrange album qui vient se loger à la 6ème place du classement. D'abord qualifié de "R&B Lo-fi", la musique de How To Dress Well évolue sur cet opus magistral vers un R&B d'église, très épuré, immaculé, mélancolique, presque lounge, aux atmosphères enivrantes de beauté...
Un ovni à découvrir d'urgence.




7. Sufjan Stevens - Silver & Gold: Songs for Christmas


Plus les années passent, plus Sufjan Stevens semble s'enfoncer dans une douce folie technicolor. Après le démentiel et électronique Age of Adz, Sufjan revient avec un triple EP (!) uniquement composé de chants de Noël (!!!). Certains sont des chants traditionnels, d'autres des compos originales de l'uluberlu, et on est frappé par la qualité du résultat, fuzzy, chaleureux, pas niais pour un sou, enjoué, mais avec une touche salvatrice de mélancolie.
Encore un grand album dans l'escarcelle du grand Sufjan Stevens.





8. The Brian Jonestown Massacre - Aufheben


Anton Newcombe nous revient avec un disque particulièrement inspiré, sur lequel il laisse tomber quelques éléments pénibles du moyen Who Killed Sgt. Pepper? pour mieux se recentrer sur ce qu'il sait faire de mieux: un psychédélisme euphorisant fortement influencé par les maîtres étalons 60's et 70's du genre, le tout teinté de touches orientales et modernistes fascinantes. Les chansons s’enchaînent avec grâce et laissent entrevoir de belles mélodies et des idées en pagaille.
Comme quoi, quand le génie indomptable de Newcombe parvient à être un minimum contenu, le Brian Jonestown Massacre nous fait toujours planer aussi haut.



9. The Shins - Port Of Morrow


Les Shins nous avaient quitté trop longtemps, mais personne ne les avait vraiment oublié, car sur la foi d'un premier album sublimement pop, le groupe avait définitivement marqué toute une génération confectionneurs de mélodies en herbe.
Avec Port Of Morrow, la bande renoue avec un sens mélodique inné pour pondre des chansons réjouissantes, très influencées par le rock britannique moderne, définitivement entraînantes et pas redondantes pour un sous.



10. The Beach Boys - That's Why God Made The Radio


Alors là... Voilà un disque qu'on n'aurait jamais imaginé. On n'y avait même pas pensé à vrai dire. Réunir tous les Beach Boys survivants et sortir un album original... Et le pire c'est que ça marche!

Alors que paraissait encore récemment les rééditions orgiaques du chef-d'oeuvre absolu qu'aurait du être Smile, la bande au complet se réunissait pour accoucher d'un album étonnamment beau, pleins de mélodies accrocheuses et pas ridicules du tout. Les rois de l'harmonie vocale n'ont rien perdu de leur génie et nous offrent quelques vocalises sublimes, avec des chansons joyeuses et entraînantes comme au bon vieux temps de Today!.

Alors bien sûr on ne tient pas ici un nouveau Pet Sounds, et on soupçonne une influence prépondérante de Mike Love sur les compos du groupe au détriment du perturbé Brian Wilson, mais quand même. On tient là un excellent album des Beach Boys. Ce n'est pas rien.



11. Ty Segall & White Fence - Hair





12. Tennis - Young And Old




13. Daniel Johnston - Space Ducks Soundtrack


Daniel Johnston est depuis toujours un fou de comic books. Quand enfin il eut les fonds et l'opportunité de réaliser son rêve, à savoir publier sa propre bande dessinée, l'occasion était trop belle pour ne pas mettre en musique ce beau projet. Et de quelle manière ce fut fait! Accompagné de plusieurs invités de marque, Daniel Johnston semble plus en forme que jamais et compose des morceaux joyeux et toujours sublimes d'un point de vue mélodique.
Encore une fois, absolument personne ne parle de cet album... On tient là pourtant un disque infiniment plus beau que toutes les crottes pop/R&B méga-surestimés du moment.



14. Woods - Bend Beyond





15. Chromatics - Kill For Love




16. Chapelier Fou - Invisible




17. M. Ward - A Wasteland Companion




18. Edward Sharpe And The Magnetic Zeros - Here




19. The XX - Coexist




20. Cat Power - Sun



Mentions spéciales: Alabama Shakes, Breakbot, Perfume Genius, Dinosaur Jr, Japandroids, Sharon Van Etten, White Fence, Alt-J, Jack White, Fiona Apple, John Talabot, Electric Guest et Beach House.

samedi 8 décembre 2012

Quelques perles oubliées

Après cette longue absence, je souhaitais m'attarder un peu sur quelques vieux albums qui me tiennent particulièrement à coeur et dont bien peu de monde parle aujourd'hui...
Ce ne sont pas des albums particulièrement durs d'accès pourtant. Et ceux qui les ont conçu ne sont pas non plus des grands inconnus pour ceux qui s'intéressent un peu à l'histoire du rock indépendant. Mais le temps a fait son oeuvre et ces disques sont passés à la trappe. Dommage pourtant puisqu'il y a là dedans de quoi tenir des années.

Felt - Me And A Monkey On The Moon
(1989)


On aurait pu évoquer le son de guitare cristallin et divin de Maurice Deebank, ces mélodies tissées avec une délicatesse infinie... Mais pas ici, puisqu'à ce stade, le guitariste génial a déjà quitté le groupe depuis bien longtemps. Me And A Monkey On the Moon est en fait le chant du cygne de Felt, puisqu'il s'agit du dernier album publié avant le split, en 1989, respectant ainsi les volontés délirantes de son leader maximo, Lawrence, qui voulait publier 10 albums en 10 ans avant de saborder le groupe.

Toujours mené donc par l'impérial Lawrence et son phrasé très caractéristique, la bande avait commencé à évoluer, depuis le chef d'oeuvre Forever Breathes The Lonely World, vers un format beaucoup plus pop. Laissant de côté les longs instrumentaux basés sur les prouesses guitaristiques de Deebank, Felt s'ouvrait de plus en plus aux claviers (piano, orgue, synthétiseur) grâce au génie de Martin Duffy, 20 ans à peine à l'époque.

Du côté de l'humeur, alors que le groupe continue de s'enfoncer dans un anonymat désespérant compte tenu de son potentiel immense, les mélodies semblent ici plus enjouées que jamais. Lawrence a la tête dans les étoiles et rêve d'amour infini en célébrant la vie, le soleil et la liberté. Le tout pour un résultat d'une beauté précieuse, spleenesque, lumineuse et presque réconfortante.

Alors bien sûr, on aurait pu parler ici de Poem of the River, dans le même veine et sublime également, du classique Forever Breathes The Lonely World, de l'immaculé et toujours fascinant The Splendour of Fear, ou encore du renversant et psychédélique Ignite The Seven Cannons... En fait, quasiment tous les albums de Felt sont des chefs-d'oeuvre. Il ne tient qu'à vous de foncer tête baissée dans leur discographie et ne jamais en ressortir.

Felt - I Can't Make Love To You Anymore


Felt - Free



Spiritualized - Pure Phase
(1995)



Le deuxième album de Spiritualized, Pure Phase, fait partie de ces disques tellement fous qu'il est impossible de le comprendre d'emblée. Trop grand, trop immense, trop ambitieux. Fondé sur les cendres encore fumantes des hautement légendaires Spacemen 3 et mené par Jason Pierce, la formation avait déjà publié d'entrée un coup de maître: Lazer Guided Melodies. Elle revient aux affaires 3 ans plus tard avec la même conviction et un album encore plus impressionnant.

Pure Phase est en fait l'album où Jason Pierce fait vraiment étalage de toute sa virtuosité pour la première fois, en incorporant dans sa musique cordes, cuivres et claviers avec une maîtrise proprement hallucinante. La largeur de sa palette n'a alors aucun équivalent dans le monde du rock. Pourtant à l'époque, personne n'a rien à foutre de Spiritualized, les ventes de cet album seront d'ailleurs mineures. La même année, Sparklehorse publiait également un chef-d'oeuvre absolu dans l'indifférence générale... Drôle d'époque donc, mais passons.

Dans Pure Phase, l'ampleur des drones shoegaze n'a d'égale que la splendeur des mélodies qui se métamorphosent et prennent des accents pop ou psychédéliques l'espace d'une chanson. Il est peu dire qu'on a depuis bien longtemps quitté la terre ferme et que toute cette magie nous a emmené très loin dans une autre galaxie.
On retrouve dans ce disque des solos de guitares électriques tellement impensables qu'on croit presque apercevoir le fantôme d'Hendrix jammer avec celui de John Cipollina le temps d'une chanson (These Blues). Ceux-ci s'évanouissent délicatement dans la nuit et laissent la place à une complainte sublime (Let It Flow), presque gospel, et tout semble naturel. Et tout l'album est comme ça, que d’enchaînements comme ceux-ci, incompréhensibles mais merveilleux pourtant.

Mais rien se sert de trop s'étendre, il vous suffit d'aller faire un tour sur Youtube, Grooveshark, Spotify ou Deezer pour vous rendre compte de toute cette magie par vous même.

Spiritualized - Pure Phase (l'album en entier!)


Spiritualized - Let It Flow



The Magnetic Fields - Get Lost
(1995)



Le succès des Magnetic Fields était resté très confidentiel au début des années 90.

Dans les deux premiers albums du groupe, Distant Plastic Trees et The Wayward Bus, Merritt faisait pourtant preuve d'une créativité débordante, avec des disques denses, bouillonant d'idées et de sons originaux. Les fans hardcore du groupe préfèrent d'ailleurs souvent ces deux albums à tous les suivants, voyant à travers ceux-ci les représentants parfaits de la beauté synthétique et romantique que pouvait atteindre Merritt dans sa prime jeunesse.

Avec The Charm Of The Highway Strip, Merritt commençait à prendre les choses en main vocalement mais cet album n'était pas son meilleur, pas le plus inspiré.
Avec Holiday par contre, les Magnetic Fields trouvent la formule gagnante. On aurait pu parfaitement parler de ce disque, un autre chef-d'oeuvre oublié dans les méandres de l'histoire de la pop, mais on a choisit le suivant, Get Lost, publié en 1995.
L'émotion restait néanmoins, je trouve, terrée derrière la voix froide et détachée de Susan Anway et les synthétiseurs, qui, volontairement, sonnaient très Lo-fi, paraissent aujourd'hui assez machinales et déshumanisés.

Get Lost est en réalité le premier album des Magnetic Fields où Stephen Merritt commence à s'éloigner un peu de cette synth-pop qui a fait les beaux jours des premiers albums du groupe et commence à prendre le micro d'avantage. L'album sonne ainsi plus personnel que jamais et n'en devient que plus touchant.

La poésie romantique de Merritt s'exprime ici avec une honnêteté teintée d'ironie qui deviendra la marque de fabrique du groupe, surtout à partir du prochain disque, l'inégalable 69 Love Songs.

C'est en fait avec Get Lost qu'on obtient les premières vraies belles complaintes classiques de Merritt qui, loin d'abandonner l'idée des synthés et du chant maniéré et baroque des opus précédents, va l'adoucir via des chansons auxquels l'auditeur de base s'identifie plus facilement. On est au final touché directement au coeur avec des pépites comme Why I Cry ou With Whom To Dance?, qui voient Merritt offrir parmi les mélodies les plus sublimes de sa vie.

The Magnetic Fields - With Whom To Dance?


The Magnetic Fields - Why I Cry (Live)